Sur les traces de l’histoire dans le quartier juif de Prague

Le quartier juif de Prague se trouve près de chez moi et j’y passe donc fréquemment. C’est un quartier dans lequel j’aime beaucoup me balader. Je trouve son architecture impressionnante, même s’il ne ressemble en rien à ce qu’il était dans le passé.

Là où se dressent de hauts buildings colorés aux nombreux détails qui réussissent toujours à capter mon regard quand je passe devant eux, se trouvaient de petites maisons brunâtres et sans chichis, construites les unes sur les autres et dans lesquelles s’entassait souvent beaucoup de monde. Là où s’élèvent des bâtiments bourgeois et des magasins chics qui s’alignent les uns après les autres, se trouvait une communauté souvent oppressée, obligée à rester ensemble dans les quelques rues d’un quartier bouclé. Là où se croisent de grandes avenues rectilignes, se trouvait un labyrinthe de petites ruelles peu éclairées.

Et si, alors, avant de vous faire découvrir ces jolis bâtiments, je vous emmenais dans le passé des rues qu’ils forment ?

C’est d’autant plus important que la culture juive fait partie intégrante de l’histoire de la ville. Non seulement la communauté juive de Prague est l’une des plus anciennes au monde (on en trouve des traces au 10^ème siècle déjà), mais elle a aussi longtemps été l’une des plus grandes et florissantes d’Europe. Vous passeriez donc à côté d’une grande partie de l’histoire de Prague si vous ne vous y intéressiez pas.

Au vu du passé des juifs en Europe, on sait que l’histoire de toutes ces personnes est loin d’avoir toujours été aussi colorée que les bâtiments que l’on peut admirer aujourd’hui dans le quartier. Avant de connaître l’horreur de la Deuxième Guerre mondiale, la communauté juive de Prague en avait connu d’autres au cours des siècles précédents, vivant et survivant au rythme des oppressions, des regains de liberté, des destructions et des reconstructions du quartier.

Son plus grand bourreau, toutefois, c’est le même que dans de nombreux autres endroits d’Europe : Adolf Hitler. La Seconde Guerre mondiale a été l’événement le plus meurtrier de l’histoire de la communauté juive de Prague.

Quand à ses bienfaiteurs, parmi les quelques noms que l’histoire a écrits, le quartier retient particulièrement celui de Joseph II. Fils de l’impératrice Marie-Thérèse, il a régné sur la ville à la fin du 18^ème siècle. Après avoir vu sa mère opprimer la communauté juive et la chasser de Prague, il a décidé d’aller dans le sens contraire. Non seulement il les a ré-accueillis dans la ville, mais il a aussi fait passer de nombreuses réformes qui leur ont offert l’égalité des droits sociaux et politiques. Son influence a été telle qu’aujourd’hui, le quartier porte son nom : il s’appelle Josefov.

Un siècle plus tard, à la fin du 19ème siècle, la ville décide d’effectuer une grande action d’assainissement dans le quartier, qui se trouve dans un état d’insalubrité sur lequel il n’est plus possible de fermer les yeux. Le plan du quartier juif change de tout au tout et, à la place des petites maisons et des rues sinueuses, s’élèvent peu à peu de majestueux bâtiments sur de larges avenues. Comme un dessin qu’on efface et que l’on recommence.

Les amoureux de littérature parmi vous aimeront aussi peut-être savoir que c’est à cette époque, entre le quartier juif d’antan et sa version assainie, que Franz Kafka nait et grandit. Certains disent que son aura se fait encore sentir dans les rues de ce quartier qui était le sien.

Aujourd’hui, seuls certains bâtiments ont persisté, comme autant de preuves du passé parsemées un peu partout dans le quartier. Ces témoins du temps d’avant, ce sont les quelques synagogues que l’on trouve encore ici et là, ainsi que l’hôtel de ville et le cimetière juif sur lequel les tombes s’empilent et tentent tant bien que mal de ne pas tomber sous la pression du temps qui passe.

Ensemble, ils forment ce que l’on appelle maintenant le “musée juif”. Le musée juif de Prague n’est donc pas un musée comme on l’entend habituellement, car il ne se trouve pas dans un seul et unique bâtiment. Il vous fait voyager dans l’histoire de la communauté juive à Prague à travers leurs synagogues et leurs lieux à eux, dans lesquels vous trouverez chaque fois de nombreux objets et explications qui retracent une partie de leur vie.

Les juifs de Prague ont énormément souffert sous Hitler, mais ils n’ont pas laissé leur passé disparaitre entièrement avec eux. Leur quartier est aujourd’hui une référence pour tous ceux qui veulent en savoir plus sur l’histoire juive.

Dans la synagogue Pinkas, juste à côté de l’entrée du cimetière juif, vous trouverez le récit de leur enfermement et leur déportation lors de la Seconde Guerre mondiale. C’est sûrement celle qui m’a le plus marquée. À la sortie du cimetière, la synagogue Klaus vous emmène à la découverte de leur culture et de leur culte. Et, un peu plus loin, se trouve sûrement ma préférée : la synagogue espagnole qui, derrière son entrée toute grise, cache un trésor aux murs dorés.

Aujourd’hui, certains limitent le quartier juif à quelques rues et d’autres lui offrent un peu plus d’espace. Je ne sais pas quelle est la version exacte, bien que j’imagine que ses frontières aient de toute façon bougé au fil des siècles. Quoiqu’il en soit, moi c’est cette version étendue du quartier que j’ai envie de vous montrer aujourd’hui.

Je vous emmène donc, de jolies façades en synagogues, vous balader dans ce quartier coloré aux loyers souvent inabordables, bordé par la place de la Vieille-Ville et le fleuve de la Vltava. Je vous emmène à Parizska, la rue du luxe (dont le nom ne veut dire autre chose que « rue de Paris »), à Dlouhá, la rue de la fête, et dans toutes les autres rues qui se trouvent entre les deux.

Et si un jour vous y passez en chair et en os, n’oubliez pas de lever la tête et d’admirer les innombrables détails de ces œuvres architecturales desquelles je n’ai toujours pas réussi à me lasser.

Si vous voulez en savoir plus sur l’histoire des juifs à Prague, je vous conseille ce petit livret réalisé par la ville de Prague.

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